il erre dans les couloirs. l'enfant-sauvage. l'enfant-star.
seul comme à son habitude, l'égocentrisme pour unique compagnie éternelle. parfois, il l'avouerait presque ; les autres lui manquent. ou plutôt ; il envie les autres d'être entourés, alors que lui joue à chi fou mi avec la solitude. c'est qu'elle est pesante, parfois.
par chance, il ne lui arrive que très rarement de se morfondre ainsi. baladant son ombre sur les murs, l'esprit ailleurs et trop occupé. il ne fait pas exprès, pour la discrétion. on dirait presque un talent naturel, qu'il a ; ne pas se faire remarquer quand il se déplace. un comble pour le gamin qui cherche les regards plus que les miettes de pain.

il sort, finalement. les rayons de la douce matinée l'attirant irrémédiablement. ses talons se traînent dans le sable et il fronce les sourcils. il ne sait pas bien où aller. la fatigue lui engourdit les muscles et anesthésie le cerveau. puis il se souvient. de la gourde dans sa main. du liquide vital qui en a disparu, la laissant vide et désemparée. alors il longe les terrains d'entraînement, en quête d'un endroit idéal pour étancher sa soif.

les journées sont longues et se ressemblent. un puzzle immense reconstruit maintes et maintes fois, non sans une lassitude à peine cachée. et ça ne fait qu'un mois et des brindilles qu'il a intégré l'escouade. peut-être que sa motivation atteindrait son pic s'il s'entendait mieux avec ses camarades par défaut. mais ça reste à voir.
pourtant, à cette bousculade incongrue, il ne s'y attendait pas. un coup d'épaule et, surpris, il bascule sur le côté. rétablissant relativement bien son équilibre, il jette une œillade agacée sur sa gauche, la lèvre pincée et la langue déjà déliée, prête à asséner son premier coup. à initier la future joute verbale.

mais non.

les mots hautains se noient dans sa gorge et ses lippes s'étirent en un large sourire horriblement spontané.
parce que c'est lucy.

lucy et ses cheveux longs qui flottent.
lucy et sa gueule d'ange qui fait chanceler.
lucy la présence qu'il recherche depuis son arrivée dans ce bataillon qui ne lui plaît pas.

« je croyais que t'avais déjà clamsé lucy, t'étais où ? »
tout en délicatesse, pour ne rien changer.
bien trop ravi pour pouvoir le cacher, il se met à rire. sans trop de raison.
« merde, t'as vraiment fini par te ramener chez les suicidaires. »

et c'est la meilleure chose qui soit, finalement.